Rêverie à La Haye

Où les stars du rock et la Renaissance vont de pair
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Auteure

Claudia Müller

Claudia Müller a grandi à Schaffhouse ainsi qu’à Gênes, ville portuaire italienne, et réside actuellement à Amsterdam, la capitale néerlandaise. Elle apprécie les bons films, l’acteur italien Marcello Mastroianni, la Dolce Vita et les délicieuses focaccia – au sujet desquelles elle a même suivi un cours en Italie. Elle a longtemps travaillé pour les éditions Ringier ainsi que pour la version en ligne du magazine «Schweizer Familie»

La troisième plus grande ville des Pays-Bas est chic, noble et authentique. Que ce soit sur le boulevard de Scheveningen ou dans la vieille ville –travailleurs, aristocrates et « expats » se trouvent tous à La Haye.

Scheveningen — chic nostalgique

Longue, large et majestueuse – c’est ainsi que se présente la plage de Scheveningen. Je puis bien comprendre qu'on y retrouve la paix après une journée de travail. En compagnie de Mandana Kooijmans, originaire de l’endroit, je me promène dans les lieux les plus fascinants de La Haye. La ville est connue par la plupart des gens comme la résidence royale et le siège de la Cour pénale internationale. Je veux sonder les côtés moins connus. Notre petit voyage commence sur les rives de la mer du Nord.

« Quand j'étais enfant, mon père m'emmenait souvent à la plage après le travail », raconte Mandana, la fille d'un diplomate néerlandais et d'une femme d'affaires persane. Elle a passé les premières années de sa vie à La Haye. Plus tard, elle a vécu à Genève, Kampala, Los Angeles et bien d'autres villes passionnantes à travers le monde. La Haye est « la maison que je n'ai jamais eue », dit-elle. Qu'il fasse beau ou nuageux, la plage a toujours été une oasis de paix pour elle.

Scheveningen était autrefois un village de pêcheurs et n'est qu'à environ six kilomètres de la gare de La Haye. Le grand boulevard, la jetée de plaisir et le Kurhaus sont caractéristiques de cette station de renommée internationale. Le Kurhaus, achevé en 1885 et classé monument historique, est un bâtiment qui fait revivre le passé.

Un véritable film se déroule dans mon imagination. J'imagine des messieurs et des dames buvant du thé, assis sur la terrasse ou osant un petit tour de piste de danse. Mandana me sort de ma rêverie avec une information intéressante. Les Rolling Stones auraient donné, en 1964, leur premier concert hors d'Angleterre dans ce palais de style Renaissance. Nous continuons notre flânerie ; sur le boulevard, nous côtoyons des « Hagenaars » - comme on appelle les bourgeois de La Haye - chiquement habillés, mais également des « Hageneses », dont les visages ridés et les tatouages décolorés racontent la vie quotidienne difficile et le travail sur les chantiers de construction.

Le palais de la Paix de style néo-renaissance, siège de la Cour internationale de justice, se cache derrière des barreaux. Le lieu où sont débattus les litiges et où sont rendus les jugements ne semble pas accessible. En tant qu'étudiante, Mandana avait l'habitude de fureter dans la bibliothèque de droit international. Non loin de là, entouré d'un jardin, trône le Palais Noordeinde, siège officiel de la monarchie hollandaise. Mandana et son père passèrent une partie de leur temps libre dans cette idylle verdoyante. « Ce jardin est comme un endroit secret », dit la jeune femme de 29 ans. Aujourd'hui, peu de monde fréquente le jardin. Les familles et les amoureux apprécient le silence ; je m'allonge dans l'herbe. « Hé, ne t'endors pas, mon endroit préféré reste à venir ! » Mandana me pousse en riant.

Avenue féérique— Lange Voorhout

Ma compagne de voyage me conduit au prochain arrêt de notre tour de ville. Il est situé au cœur de la vieille ville et est l'un des plus beaux et des féeriques endroits en existence, selon elle. Lange Voorhout, une avenue de quelque 500 mètres de long, fut jadis la demeure de l'aristocratie. « Enfant, je me suis toujours sentie comme une princesse », dit Mandana. Je dois inévitablement penser à Yasmine d'Aladin, à qui elle ressemble étonnamment. On lui permettait toujours de choisir un petit quelque chose lorsqu’ils passaient devant. L'avenue a effectivement quelque chose de féerique. J'imagine des dames vêtues de robes rococo se promenant le long de l’avenue en se rendant au palais. « Par ici », dit ma compagne. Nous nous dirigeons vers le Buitenhof.

Hofvijver und Buitenhof — le centre politique

Le bâtiment gouvernemental du Hofvijver est partiellement entouré d'eau et semble flotter. Mais les apparences sont trompeuses. Contrairement à l'île qui se trouve en face. Car celle-ci flotte vraiment au milieu de l'eau. La Haye possède cette grandeur que l'on attend d'une ville à la présence internationale. Mandana explique : « Beaucoup de gens viennent à La Haye pour travailler et c'est plutôt calme le soir. » Je veux savoir pourquoi une cosmopolite comme elle a choisi de vivre ici. « C'est le mix des gens ici, un peu comme à New York », dit-elle. De plus, elle trouve l'authenticité ici. La gentrification, qui ne peut être arrêtée dans d'autres grandes villes, ne semble pas encore s’être accaparée de La Haye. Malgré tout, bien des choses ont changé depuis les années 1980. Avec le temps, des quartiers à problèmes comme Schilderswijk ou Transvaal sont devenus des quartiers résidentiels, sans cafés « hipster », ni concept stores. La Haye semble intouchable - comme une dame élégante en tailleur, avec des bijoux voyants et un brushing à la « princesse Beatrix ». M’accordez-vous cette danse ? lui demande son époux.

Photos : Sven Driesen